La femme du pêcheur
Par la sainte Madone,
Pierre, ne t’en va pas !
Entends ; la foudre tonne
Sur le rocher, là-bas.
Voici venir l’orage ;
Oh ! reste ici ce soir,
On ne voit plus la plage
Et le ciel est bien noir.
Vois, la mer est houleuse,
Les bateaux sont au port ;
Sur la rive écumeuse
Roulent des bruits de mort.
Ta barque est trop fragile
Pour un si grand courroux :
Reste dans cet asile,
Je t’en prie à genoux.
Entends, la cloche tinte
Pour les pauvres absents ;
On dirait une plainte
De veuves ou d’enfants.
Que j’ai peur quand la nue
S’entrouvre en rugissant !
Qu’à la rive inconnue
Dieu protège l’absent !
Par la sainte Madone,
Pierre, ne t’en va pas !
Entends, la foudre tonne
Sur le rocher, là-bas.
Mme Julien GIRAUD.
Paru dans L’Année des poètes en 1897.