Jean sans Terre
s’agenouille
devant la cathédrale
de Strasbourg
Ô cathédrale
Du pur amour
Ultime escale
Des sans-retour
Lorsque ta cloche
Sème le Temps
Haut dans ta roche
L’ange m’attend
Toi qui questionnes
Depuis mille ans
L’éclair qui tonne
Et le milan
Épi de pierre
Tour de sueur
Par la prière
Par la ferveur
Tu deviens rose
Et tu fleuris
Métamorphose
Du seul esprit
Chaste bouture
Du beau jardin
Puisant ta pure
Foi dans le Rhin
Fille des vignes
Et des houblons
Captant les signes
Des horizons
Ainsi tu pousses
Plus haut toujours
Les aubes rousses
Sont tes amours
Les pleines lunes
Et les vieux ors
Des crépuscules
Sont tes trésors
Mât des prairies
Face aux azurs
Toi qui n’oublies
Aucun impur
Je m’agenouille
Sur ton parvis
Et je te souille
De peccavis
Moi qui me couche
Sous ton portail
L’amère bouche
Empestant l’ail
Qui aimais boire
Le vin grenat
Volais les poires
Des pensionnats
Moi pâle frère
Des grands chemins
Dont la misère
Chassait les chiens
Vois je m’imprègne
Dans tes replis
Et ma main saigne
Du sang du Christ
Et je réclame
Ton doux baiser
Grande Madame
Pour m’apaiser
Ivan GOLL, 1939.
Paru dans La Nouvelle Relève
en février 1942.