Le réveil
L’aube effleurait des monts les courbes indécises ;
L’horizon blanchissait, puis devenait vermeil,
Le coq, et l’Angelus, envolé des églises,
Sonnaient aux vignerons l’heure d’un prompt réveil.
Les sabots, dans la cour, heurtaient les pierres grises ;
Tous les pleurs de la nuit retournaient au soleil,
Et les petits enfants, frais comme des cerises,
Aux rayons du matin secouaient leur sommeil.
On accouplait les bœufs ; les vaches nourricières
Quittaient l’étable ouverte et les chaudes litières ;
Chaque abeille au travail volait sous le ciel bleu ;
Les oiseaux savouraient le jour qui les enivre.
Les insectes, les fleurs aspiraient à revivre,
Et moi je me disais : « Qui peut oublier Dieu ? »
Louis GOUJON.
Paru dans L’Année des poètes en 1890.