La mer
À l’aube sur la mer, quand monte le soleil
Que semble équilibrer une lune d’opale
Plongeant à l’horizon dans l’ombre nuptiale,
On aperçoit le monde à son premier réveil !
Qui dira la beauté de la mer éternelle,
Ses matins de rubis, ses reflets et ses jeux,
Ses couchants embrasés aux déploiements de feu,
Elle-même toujours et sans cesse nouvelle ?
Vives et claires eaux qui jaillissent de Dieu,
Imprévisibles comme à l’heure originelle,
Libres, vous bondissez sur la terre charnelle
Lorsque l’homme comblé dominait sous les cieux.
Elle reste longtemps cette mer ténébreuse
Où règnent l’inconnu, la nuit et les périls
Que fréquenta longtemps Ulysse en son exil,
Pauvre errant sur les flots aux colères rageuses.
Maléfique océan, il a fait s’engloutir
La vieille cité d’Ys ; quand grondait la tempête
Les marins entendaient pleurer la triste fête
D’un glas qui ne veut pas cesser de retentir.
Quand jaillit le soleil de l’onde violacée
On voit battre le cœur immense de la mer
Que rythment matelots et vaillants loups de mer,
D’âge en âge écrivant la nouvelle Odyssée !
Élie GOULET.
Recueilli dans Feuilles d’érable, fleurs de lys,
anthologie de la poésie canadienne-française
établie et présentée par Pierre Cabiac,
Éditions de la diaspora française, 1966.