Douce France
De dulce France à remembrer li prist.
(Chanson de Roland, v. 2, 379.)
Quand nos aïeux dans les combats
Sentaient venir la mort, tout bas
Ils invoquaient la « douce France »,
Et l’on voyait sourdre des pleurs
Aux yeux de ces fiers batailleurs,
À cette chère souvenance.
Douce France ! moi j’ai voulu
Chanter ici ton peuple élu,
Grand par l’idée et par le glaive,
Ton parler, doux comme le miel,
Tes femmes à l’œil vif, ton ciel
Où l’espérance enfin se lève 1.
Fouillant tes fastes glorieux
Afin de te connaître mieux,
J’en ai rapporté ce poème ;
Rêveur épris de ta beauté,
Le cœur débordant, j’ai chanté
Comme aux pieds de celle qu’on aime !
Quand par le monde, où l’on t’attend,
Il reste à faire tant et tant
Pour que le Bien ait la victoire,
Que ton rôle soit terminé,
Non, dans son amour obstiné,
Mon cœur de fils ne le peut croire !
Soldat du Christ et son flambeau,
On a pu te mettre au tombeau,
Mais comme Lui tu ressuscites,
Plus puissante et plus belle encor,
Pour entraîner dans ton essor
Les nations, tes satellites.
Et c’est pourquoi, moi ton enfant,
Certain du signe triomphant
Que ton histoire porte en elle,
Je te chante pour que tes fils
Sachent t’aimer comme jadis.
Douce France, mère immortelle !
Georges GOURDON,
Chansons de geste et poèmes divers,
1901.
1. Écrit au lendemain de l’alliance franco-russe.