Par le destin le plus contraire
Ah, peux-tu regarder, mon cœur, le ciel sans larmes,
dedans sans désespoir, dehors sans flots de pleurs,
de douleur se peut-il que je ne meure pas
quand je le vois acier et pierre devant moi ?
Ah, sur tant de misère le soleil peut-il luire ?
Mon cœur, durcis ton cœur. Tiens-toi comme le lion
au centre du malheur, debout. Chacun verra
comme dans l’affliction s’affine ta vertu.
Accepte ce qu’Il veut. Tais-toi, même brisé :
pourvu que ton désir de servir Dieu demeure !
Lutte avec toi pour Lui, afin que de ta gloire
Sorte plus que le sang ; brûle ta vie, chandelle,
dans la ferveur fidèle ! Songe : quelle victoire,
si mon Dieu a la gloire, fussé-je moi vaincue !
Catharina Regina von GREIFFENBERG.
Recueilli dans Anthologie bilingue
de la poésie allemande,
Gallimard, 1993.