Le témoin
Ce n’était que sanglots et longs cris atterrés...
Au sommet du grand mât, un oiseau, – l’hirondelle, –
Sans doute fatigué, s’en vint, tirant de l’aile ;
Le pont retentissait d’appels désespérés.
Du navire, soudain, les flancs noirs effondrés,
Lentement dans l’abîme ont coulé : Mort cruelle !
Malheureux qu’engloutit la mangeuse éternelle,
Un hôte ailé répond à vos adieux sacrés !
La mer sut le secret de leur lente agonie ;
Sur leur tombe, où grandit sa sauvage harmonie,
La tempête traçait des sillons bondissants.
Le dernier mât sembla menacer les cieux mornes,
Mais, lorsqu’il disparut dans les flots mugissants,
L’oiseau reprit son vol vers l’horizon sans bornes.
Jules GRISEZ-DROZ.
Paru dans L’Année des poètes en 1891.