Le jugement
SEIGNEUR, je sais que le mal est inhérent à l’existence. Sans cesse je résiste à la vérité. Toujours mon cœur est à nouveau convaincu de péché. Ainsi je comprends le message du jugement, et je l’accepte, et je m’y soumets. Il faut qu’il y ait un jugement pour que justice se fasse. Je le confesse contre moi-même, car je sais que je ne peux pas subsister devant ce jugement, mais il faut qu’il ait lieu afin qu’arrive votre règne, qui est justice, et que vous receviez « la louange et l’honneur et la puissance ».
Oui, je réclame votre jugement. Ce ne sont pas d’autres qui le subiront, mais moi-même, et cependant j’aspire à lui parce que j’aspire à la vérité et à la justice. C’est vous qui serez notre juge, Seigneur Jésus-Christ. Vous serez aussi puissant que vous êtes vrai, aussi grand que vous êtes saint, et terrible pour le monde plongé dans le mensonge et le mal. Mais ce n’est pas pour venger et détruire, c’est en Sauveur que vous viendrez ; ainsi, le jugement sera le dernier des actes divins et consommera la rédemption.
Vous qui savez tout, vous savez aussi combien mon impuissance est grande. Vous qui pouvez tout, vous êtes le maître de la grâce. Je m’en remets donc à votre sentence. Elle accomplira la vérité mais, selon le mot de votre apôtre, celle-ci aura nom « amour ». Amen.
Romano GUARDINI,
Prières, Bloud & Gay, 1952.
Traduit de l’allemand
par Jeanne Ancelet-Hustache.