Cloches des veilles de Pâques
Ô cloches, cloches du soir,
Qu’on sonne aux veilles de Pâques,
Cloches d’heur, cloches d’espoir,
Maintes fois, j’allais m’asseoir
Sous les ramures opaques,
Ô cloches, cloches du soir,
Vous entendre vous douloir
En notes élégiaques ;
Je vous aimais sans vous voir,
Ô cloches, cloches du soir.
De quels pays parliez-vous,
Ô cloches mélancoliques,
Aux mélodieuses toux ?
De l’Italie aux cieux doux,
De paisibles bucoliques,
De quels pays parliez-vous ?
D’où vous en veniez-vous, d’où ?
De lointaines basiliques
Dans les crépuscules roux ?
De quels pays parliez-vous ?...
Cloches, vous vous êtes tues,
Me laissant seul, affaibli
Des batailles combattues.
Ô Silence, tu me tues
Où je suis enseveli :
Cloches, vous vous êtes tues. –
Le lierre étreint les statues
Dans l’herbe folle abattues,
L’herbe triste de l’Oubli...
Cloches, vous vous êtes tues.
Charles GUÉRIN.
Paru dans L’Année des poètes en 1894.