Le bonheur

 

 

 

Oh ! ne doute pas du bonheur, quelques grandes et nombreuses qu’aient été tes déceptions. Il peut descendre sur un pont d’or, tout à coup, quand tu t’y attends le moins. Insensible à tes plaintes, à tes pleurs, il a beau tarder longtemps, un jour il t’apparaîtra, un jour il aura son heure de félicité.

Attache-toi à suivre ses traces ; ta fidèle confiance peut le faire éclore dans les champs, le faire descendre en rosée des étoiles, ou tomber en pluie des airs comme une feuille de rose ; tu peux le rencontrer soudain au milieu du tumulte de la ville.

Quand, dans le silence du désert, ton courage se croit à jamais perdu, il peut, en un instant, s’incliner vers toi comme un front rayonnant d’amour. Quand, aux murs de la prison, le désespoir voit se briser ses supplications craintives, il peut, en un moment, avec un torrent de délices, envahir ton âme.

Si, dans ta jeunesse, tu l’as vu fuir et rester inexorable, il peut tresser des couronnes à l’homme mûr. Il ne vient jamais trop tard. Il peut transporter le vieillard même, et jusqu’à l’heure de la mort, il peut imprimer en te bénissant son baiser sur ta bouche livide.

 

 

 

Robert HAMERLING.

 

Recueilli dans Les Grands Auteurs

de toutes les littératures,

Nouvelle Bibliothèque populaire,

dirigée par Henri Gautier.

 

 

 

 

 

 

 

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