Notre-Dame des blés
à Marie, Reine du monde
I
Par le jour qui va poindre en sa splendeur voilée,
Offrant son doux parfum au calice des fleurs,
Par la cloche qui chante au cœur de la vallée,
Par les bois incrustés de subtiles couleurs
Et par les fruits vermeils alourdissant les branches,
Par l’ocre des labours et les fenils comblés,
Par la douceur des soirs, la paix des beaux dimanches,
Je voudrais vous bénir, Notre-Dame-des-Blés !
Par le frisson du vent dans la rouille des saules,
Des quenouilles bordant les marécages verts,
Par l’homme qui revient, le joug à ses épaules,
Quand l’étoile de neige annonce les hivers ;
Par le cœur des petits aux genoux de leurs mères
Et des vieillards, autour de l’âtre rassemblés
Pour des heures d’amour et des heures amères,
Je voudrais vous bénir, Notre-Dame-des-Blés !
II
Car le blé c’est le pain, et le pain c’est la vie...
Reine de l’Univers, ô sauvez la moisson
Des hommes tourmentés par la haine et l’envie,
Et donnez à nos cœurs des larmes, des chansons,
Pour qu’à l’arbre de paix un fruit de pénitence
Se détache à jamais, dans un vent fraternel,
Et roule sur le globe où sous votre régence
Germeront les vertus du pain sacramentel !
Alors des fleurs naîtront sur la cendre des ruines,
Les oiseaux couveront dans les bocages verts,
Les printemps seront doux comme miel, les famines
N’accableront jamais le ciel des purs hivers !
Du haut de votre trône, ainsi d’un pôle à l’autre,
Ô Mère des petits, des grands, des accablés,
Vos yeux contempleront des légions d’apôtres
Et, avec eux, le Christ marchant parmi vos blés !
Charles-E. HARPE.
Paru dans la revue Marie en 1947.