À ceux qui souffrent

 

 

Ô vous, parias de ce monde,

Apôtres sacrés du devoir,

Votre douleur est si profonde

Que nul humain ne peut la voir.

 

Sous le couvert de l’apparence,

Qui, seule, suffit ici-bas,

Vous déguisez votre souffrance,

Et l’on vous croit heureux, hélas !

 

Tandis que tout votre être saigne,

Que vos pieds rompus sont meurtris,

Votre âme si noble dédaigne

La plainte propice au mépris.

 

C’est une lutte de toute heure,

Que soutient votre dignité,

Contre le tourment qui demeure

Et triomphe en réalité.

 

Et dans vos grands yeux impassibles

Qu’un faux pleur n’a jamais souillés,

Passent des mondes impossibles,

Où souvent vous vous oubliez...

 

 

 

Léon HÉLY.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1895.

 

 

 

 

 

 

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