Berceuse
Voici la nuit, voici le courroux de l’orage,
L’arbre courbé par le vent fort,
Dans le jardin obscur la tourmente fait rage,
Le doux petit enfant s’endort.
Dans son lit blanc, bercé comme par une voile,
Son léger souffle est régulier.
Seigneur qui pouvez tout, n’éteignez pas l’étoile
Qui brille au coin du peuplier.
Seigneur ! regardez-le dans sa frêle nacelle
Que protège le rideau blanc.
Oh ! ne permettez pas que la barque chancelle
Avec le mince oiseau tremblant.
Qu’il dorme ! autour de lui que la rafale passe
Que l’arbre au dehors soit ployé !
Contre tout ce qui gronde et tout ce qui menace,
Nous sommes là pour le veiller.
Qu’il dorme ! Il a le temps de devenir un homme,
Mais ce soir encore, Seigneur,
Laissez-lui le candide et le tranquille somme
De sa petite bouche en cœur.
Marguerite HENRY-ROSIER.
Extrait de Le Monde est à toi, Éditions Lemerre.