Pensées
L’hypocrisie est le masque de l’âme.
Heureux le clairvoyant qui reconnaît l’infâme.
– La saine liberté donne droit à tout homme
D’agir et de penser au gré de son désir...
Mais par contre, ce droit impose même somme
De devoirs à remplir.
– Combien grande est l’impatience
Du novice poète aux mains de l’imprimeur.
Et que faible souvent est la reconnaissance
Du public, avalant son amère primeur....
– Le prêt avec usure est un vol détourné,
Vol d’autant plus affreux qu’il n’est pas deviné.
– Le fanfaron bien souvent n’est qu’un lâche
Qui réussit parfois à troubler ceux qu’il fâche...
Mais qui change bientôt de manière et de ton
Lorsque son adversaire a du poil au menton.
– Il n’est pas un trésor plus beau que l’espérance :
Ce trésor mis à sec... au diable l’existence.
– Qui croit à la vertu, qui croit au sacrifice,
A toujours en horreur l’égoïsme et le vice.
– Quoique rien ne soit mieux que la reconnaissance,
De tous les sentiments c’est le plus négligé...
Aussi, doit-on mépris et blâme à l’obligé
Qui du bien qu’on lui fait ne garde souvenance.
– La pudeur chez la femme est un bienfait du ciel.
Seul, l’homme dépravé n’en goûte pas le miel.
– Heureux ou malheureux tout amour a son charme...
Le rire fait parfois moins de bien qu’une larme.
– On dit que la douleur nous tue... insigne erreur,
C’est plutôt cent fois nous qui tuons la douleur.
– L’égoïsme et la maladie
Marchent toujours de compagnie.
Tant il est vrai qu’en sa douleur
L’homme ne croit qu’à son malheur.
– Sous le prétexte vain
De n’être pas certain
De bien faire l’aumône,
Que de gens ici-bas ne donnent à personne !
L. HIEL.
Paru dans La Tribune lyrique populaire en 1861.