Ballade des anges
Ce soir, mon rêve se promène
Dans les vastes plaines des cieux,
Et, loin de la clameur humaine,
Ma muse au vol capricieux
Tend son essor audacieux.
– Bonheur sans trouble et sans mélanges,
Enivrement délicieux, –
Je chante la douceur des anges.
Un seul de nos sanglots amène
L’essaim folâtre et gracieux :
Leur tendre pitié se démène,
Des pleurs s’échappent de leurs yeux,
Et ces pleurs, baume précieux,
Rien qu’en tombant parmi nos fanges,
Apaisent nos cœurs soucieux ;
Je chante la douceur des anges.
C’est ainsi que, l’autre semaine,
Pour moi, qu’un sort fallacieux
Sans jamais se lasser malmène,
L’un d’eux vêtit, insoucieux,
Notre corps si disgracieux...
Et je l’ai revu dans ses langes,
Adorable et silencieux :
Je chante la douceur des anges !
Mais Dieu, le grand victorieux,
Ne se fait point à ces échanges :
L’enfant a regagné les cieux...
Je chante la douceur des anges !
Ferdinand HUARD.
Paru dans L’Année des poètes en 1890.