Le mercredi des cendres

 

 

 

Cessez la danse et les chants joyeux. Ici, dans le silence sévère de la piété, des couronnes funèbres parlent, une croix de cendres dit : Tout ce qui est né ici-bas deviendra cendres et poussière !

 

Que des autels ce cri pénètre dans les palais, qu’il y interrompe la fête, qu’au lieu du banquet il retentisse dans les salles royales. Ceux qui tiennent le sceptre ici-bas deviendront cendres et poussière !

 

Qu’aux lieux où s’élèvent les trophées, aux lieux où triomphent les conquérants, où tremblent les peuples, ces mots retentissent sourdement : Tout ce qui porte ce laurier ici-bas deviendra cendres et poussière !

 

Comme ils combattent ! Comme ils s’agitent ! Comme ils cherchent ! Comme ils maudissent ce qu’ils ont trouvé !

 

L’esprit inquiet entasse des rochers pour les rejeter ensuite. Tout ce qui s’agite ici-bas deviendra cendres et poussière !

 

Vois le temple ! Des hommes, des vieillards, des jeunes gens y marchent, la mère ravie presse son enfant sur son sein. Tout ce qui fleurit et mûrit ici-bas deviendra cendres et poussière !

 

Hélas ! semblables à eux, des milliers d’êtres vinrent et s’en allèrent. Leurs noms sont oubliés, leurs ossements sont sous la pierre qui se brise. Tout ce qui naît ici-bas deviendra cendres et poussière !

 

Abandonnée du monde, sans amis, sans repos, la fidélité regarde dans une tombe ouverte. Ce qui aime si puissamment ici deviendrait-il cendres et poussière ?

 

Des plaintes amères se font entendre dans les plus beaux jours du printemps. C’est l’épouse du génie qui gémit; son bien-aimé n’est plus qu’une ombre ! Non, l’amour ne peut périr, ce qui meurt ressuscitera !

 

Et ce désir fraternel d’essuyer toutes les larmes ? Cette charité qui remplit la main du pauvre, qui paie la haine de bienfaits ? Non, tout cela ne périra pas ! Ce qui meurt ressuscitera !

 

Ceux qui tournent leurs regards vers le ciel, qui nourrissent un divin espoir, qui fuient ce monde d’illusions, qui s’agenouillent devant l’autel; oh ! ils ressusciteront. La foi ne peut périr !

 

Ceux qui s’abandonnent au père des âmes, et qui, purs de la poussière terrestre, voient en esprit le céleste but, eux aussi ils périraient ? Non, l’espérance échappera à la mort !

 

Vois, aux autels silencieux les couronnes funèbres s’illuminent. Cette croix de cendres marque au sceau de la mort la grandeur humaine et les charmes terrestres. Mais la terre redeviendra terre, et l’esprit sera glorifié.

 

 

 

Johann Georg JACOBI.

 

 

 

 

 

 

 

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