Passion

 

 

Fils de Marie, mené dans ce faubourg,

Crois de chanter que je n’ai point l’envie,

Mais de laisser mes yeux brûler de pleurs

À ce dédain qu’ils avaient de ta vie,

Le Tribunal et les exécuteurs.

Fut-il jamais un plus noble visage,

Aimable aspect, le regard calme et doux,

Plus de tendresse et parole plus sage,

Si près de l’homme et tant par-dessus nous ?

Hélas! je vois ton front tout déchiré

Par un torchis de végétaux piquants

Et tes cheveux, par la ronce offensés,

Sur ton cou blanc laisser tomber du sang.

Ô pieds soyeux, vénérables mains blanches !

Tirant d’un sac tenailles et marteaux,

Les menuisiers, contre une rude planche,

Vous ont tourné à vous casser les os.

Du corps pesant s’agrandit la douleur ;

Du fouet cinglant il a les cicatrices.

En ce printemps qui fait venir les fleurs,

Il n’en est pas une qui ne pâlisse.

Quoi donc ! hier, pour une pichenette,

Que fit la dent du chien de mon ami,

Je me sentais l’humeur devenir blette,

Brouiller le cœur et perdre mon esprit !

Quoi qu’il t’arrive en ta vie inquiète,

Songe aux douleurs du Seigneur Jésus-Christ.

 

 

 

Max JACOB.

 

 

 

 

 

 

 

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