Les jours où l’âme est triste

 

 

Il est des jours où l’âme est triste. Elle retombe.

Et Dieu ne répond plus, semble-t-il. Et l’on songe

À la sueur d’angoisse, à l’abandon du Fils.

L’âme est triste jusqu’à la mort. Et on supplie,

On s’obstine. Mais Dieu, comme un mur de cachot,

Demeure sourd, et l’on flotte dans le chaos.

Et le cœur se dissout dans l’âme ainsi troublée.

Alors, tenant ainsi qu’une poignée de blé,

Son chapelet, ces grains de l’humilité sombre,

Le poète le sème aux divins champs de l’ombre

Où germe la moisson de toutes les prières.

Il sent confusément qu’une grande Lumière

Lui est cachée par son corps dont il ne peut sortir.

Pour briser la cloison, et voir, il faut mourir.

L’œil ne laisse passer que ce jour de souffrance

Que voit un prisonnier qui attend sa délivrance.

Le poète s’obstine, il appelle son Dieu.

Or, tandis qu’il l’appelle, un Sens mystérieux

Semble à peine venir, mais vient, des profondeurs

Qui le recouvrent peu à peu comme un plongeur.

Ce sont les fruits de son rosaire qui éclosent

Dans le Ciel. Ce sont les fruits de Foi interdits

Au triste orgueil qui méprise ces grains de buis

Parce qu’il ignore le mystère de toute chose.

Tranquille et nu se pose au dessus du blasphème

Le pied d’une petite enfant Nazaréenne.

 

 

 

Francis JAMMES.

 

Recueilli dans Poètes de Jésus-Christ,

poésies rassemblées par André Mabille de Poncheville,

Bruges, Librairie de l’Œuvre Saint-Charles, 1937.

 

 

 

 

 

 

 

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