Les deux voix
Sur la grève, je vois, la marée étant basse,
Tout au bord de la mer, un prêtre à cheveux blancs.
Il lit son bréviaire : il va, passe et repasse,
Se détachant, tout noir, sur les flots reluisants.
Sonore sous le vent qui rudement la chasse,
La mer, en sa musique aux robustes accents,
Chante le Créateur, dont la pensée embrasse
Le mystère et la loi de tous les océans.
Le prêtre, recueilli, de sa lèvre pieuse
Laisse voler vers Dieu la prière, encens pur
Qui parfume la terre et monte au ciel d’azur ;
Et j’écoute, et j’accueille, en mon âme rêveuse,
L’harmonieux cantique où se mêlent les voix
Des choses et de l’homme, à deux disant : « Je crois ! »
JANSSENS DE BISTHOVEN.
Paru dans L’Année des poètes en 1890.