Le soleil entre dans
la maison de la Vierge
Il est monté dans le pays
Une année souriante,
Lorsque la Vierge a noué le ruban
Autour de ses cheveux brillants
Pour aller suivre les traces du Lion.
Ô toi, jeune fille du mois des moissons,
Ô toi, jeune fille des soirées sombres et tièdes,
Je veux respirer ton désir odorant,
Ton parfum pareil au germe du printemps dans les foins.
Je veux me baigner dans l’étang aux oiseaux,
Dans le cours d’eau mordoré.
Je veux dormir dans le foin et dans la grange
En un rêve flamboyant de la Saint-Laurent.
Il est monté vers les montagnes
Lorsque le soleil rouge s’est levé
Dans sa braise de canicule
Par-dessus les landes où la couleur écarlate
Tel un feu bouillonnant sur la broussaille et les airelles.
Je veux aller là-haut vers la montagne
Qui se dresse dans la brume tremblante
Et où les nobles faucons chassent
En leur domaine bleu et royal.
Je veux chevaucher le lichen
Sous le drapeau de la Vierge,
Et à l’ombre dans la haute vallée
Je veux établir mes quartiers.
Puis il est descendu dans la vallée.
Une nuit de pleine lune,
Une nuit de lune d’or.
Alors s’est éveillé le rossignol
Qui était perché muet dans son cœur.
Ô toi, oiseau abattu, oiseau prisonnier,
Envole-toi dans le val à la verdure tendre !
Je suis saoul du présent et du passé,
Je suis jeune de tourments enivrés.
Le printemps qui s’était écoulé
Était comme neuf dans la terre des montagnes,
Et il chanta comme à l’époque des rossignols
Pour entendre son cœur.
Erik Axel KARLFELDT.
Recueilli dans Anthologie de la poésie suédoise,
choix, traduction, introduction et notes
par Jean-Clarence Lambert, Seuil, 1971.