Judith
À Marthe Mellot.
Elle s’est parée comme une épousée
La fille d’Israël que le chef de l’armée
Assyrienne auprès de lui appelle.
Jamais Victoire n’offrit à nul héros de couronne plus belle :
Les pierreries, aux regards sorciers
Qui brillent sur son sein en murmurants colliers
Ont moins de lueurs que ses noires prunelles ;
Et les fines étoffes, répandues en nobles plis
Sur son corps pur, frotté d’huiles odorantes
Semblent les voiles mêmes de l’aube au doux souris.
En sa bouche plaisante sont les discours avisés
Comme le miel dans une fleur de grenadier.
La Nuit diaphane, couronnée d’étoiles,
Va déclore bientôt son lourd portail ;
Mais, avant que le Jour ait fait voguer ses claires voiles,
Le Seigneur accomplira ses desseins
Par cette main petite et tendre comme un ramier sauvage.
Elle a laissé ses habits de veuve à Bethyloua
Et vient, ceinte de grâce, en ses vêtements joyeux,
Au susurrement câlin des pendants d’oreilles
Et des bracelets, sur ses chevilles et sur ses bras.
Son pas harmonieux est guidé
Par la puissante droite d’Iahvé,
Qui veut que son peuple gémissant
Lave son opprobre et sa honte – dans le sang.
Et, penchée sur le chef endormi, comme une amante,
Elle prend l’épée recourbée qui, dans sa main charmante,
Va devenir le Saint Glaive vengeur.
Maria KRYSINSKA.