L’aumône sur le chemin de Jéricho
Dans le jardin du ciel, la fleur du plus grand prix
Est l’humble charité, qui, pleine de tendresse,
Des maux du délaissé veut partager l’ivresse,
D’un coup d’œil elle a vu, d’un mot elle a compris
Du blessé du chemin quelle était la détresse ;
Elle a soigné sa plaie et dans ses bras l’a pris.
Choyons en notre cœur la royale vertu
Que le Christ dans sa vie a toujours caressée,
Qu’il tint si fortement sur la croix embrassée !
Par elle relevons le courage abattu :
À nos derniers moments, la plus douce pensée
Sera pour nous d’avoir en elle combattu !
Nous donnons à la fleur ornant notre demeure,
Pour résister au froid de l’hiver, un abri :
De l’oiseau poursuivi nous entendons le cri,
Et sa plainte affolée en notre âme demeure.
Oh ! que celui qui pleure, un jour chez nous ait ri !
Sans se savoir aimé que nul jamais ne meure !
Ne nous détournons pas de qui nous tend la main :
Le pauvre a bien assez de sou lot de souffrance
Pour que nous n’allions point, par notre indifférence,
Lui rendre encore plus dur son pénible chemin !
Que notre bon accueil lui soit une assurance
Qu’il ne pèse pas trop aux bras du genre humain !
Dieu nous donna : donnons. Sans peine ouvrons la porte
Au souffreteux qui vient. Traitons avec bonté
Ce frère de Jésus. Couvrons sa nudité :
Calmons sa faim, sa soif, fût-il méchant, n’importe,
C’est un passant allant vers son éternité :
Et l’obole qu’on donne, un ange au ciel la porte !
Abbé J. LABAIG-LANGLADE.
Paru dans L’Année des poètes en 1895.