Le Limousin
OU LE DÉSIR DE LA TERRE NATALE
Sit meæ sedes utinam senectæ !...
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Unde si Parcæ prohibent iniquæ...
HOR. Od.
Ô toi qu’ils ont nommée une autre Béotie,
Deux fois chère à mon cœur pour tes affronts soufferts,
Toi que je veux, vengeur de ta gloire obscurcie,
Célébrer dans mes vers ;
Terre qui vis, aux jours de la chevalerie,
Dans tes humbles manoirs, comme en tes fiers donjons,
S’épanouir la fleur de la galanterie
Et la fleur des chansons ;
Terre des vieilles mœurs et des âmes honnêtes,
Terre des nobles preux et des beaux palefrois,
Toi dont les fils un jour ont élevé leurs têtes
Même au-dessus des rois ;
Limousin, mon pays ! dont j’aime les bruyères,
Les prés, les chemins creux, les sites dédaignés,
Les gorges, les vallons, les limpides rivières,
Et les grands châtaigniers ;
Puissent, puissent enfin tes calmes solitudes
Rappeler leur enfant qui les pleure toujours !
Puissent de tant de vœux, de courses et d’études
S’y reposer mes jours !
Que si de mon bonheur la fortune jalouse
Doit se jouer encor de ce pieux dessein,
Cité des vieux Raymonds, garde, garde, ô Toulouse,
L’exilé dans ton sein.
Entre toutes, mon cœur préfère cette ville
Où le printemps parfois rit au sein des hivers,
Où, parmi les doux fruits d’une terre fertile,
Éclosent les beaux vers.
La charité, la paix habitent son enceinte ;
De la foi dans ses murs brille le pur flambeau.
En répandant des pleurs, ici l’amitié sainte
Priera sur mon tombeau.
Firmin de LA JUGIE.
Paru dans le Recueil de l’Académie
des jeux floraux en 1852.
Note de l’Auteur : L’on sait que cette province s’est illustrée par ses Chevaliers, par ses Troubadours, par ses Papes ; ce qui n’a pas empêché Rabelais et Molière de traiter les Limousins de Béotiens.