Hymne

 

 

Prière ! ô voix surnaturelle

Qui nous précipite à genoux,

Instinct du ciel qui nous rappelle

Que la patrie est loin de nous,

Vent qui souffle sur l’âme humaine

Et de la paupière trop pleine

Fait déborder l’eau de ses pleurs,

Comme un vent qui par intervalles

Fait pleuvoir les eaux virginales

Du calice incliné des fleurs !

 

Sans toi que serait cette fange ?

Un monceau d’un impur limon

Où l’homme après la brute mange

Les herbes qu’il tond du sillon ?

Mais par toi son aile cassée

Soulève encore sa pensée

Pour respirer au vrai séjour,

La désaltérer dans sa course

Et lui faire boire à sa source

L’eau de la vie et de l’amour !

 

Le cœur des mères te soupire,

L’air sonore roule ta voix,

La lèvre d’enfant te respire,

L’oiseau l’écoute aux bords des bois ;

Tu sors de toute la nature

Comme un mystérieux murmure

Dont les anges savent le sens ;

Et ce qui souffre, et ce qui crie,

Et ce qui chante, et ce qui prie

N’est qu’un cantique aux mille accents.

 

Ô saint murmure des prières,

Fais aussi dans mon cœur trop plein

Comme des ondes sur des pierres

Chanter mes peines dans mon sein !

Que le faible bruit de ma vie

En extase intime ravie

S’élève en aspirations,

Et fais que ce cœur que tu brises,

Instrument des célestes brises,

Éclate en bénédictions.

 

 

 

Alphonse de LAMARTINE.

 

Recueilli dans Poètes de Jésus-Christ,

poésies rassemblées par André Mabille de Poncheville,

Bruges, Librairie de l’Œuvre Saint-Charles, 1937.

 

 

 

 

 

 

 

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