Vous filiez… je couds…
Vous filiez la quenouille,
Vierge de Nazareth, en votre temps.
De nos jours, les femmes filent moins,
Mais elles tiennent l’aiguille aisément.
Voyez, ce soir, je brode cette nappe.
Un autre soir, ce sera le ravaudage
Et c’est ainsi, chaque jour,
Quand la besogne finit et que les enfants se calment.
Vous filiez près de l’époux, le bon Charpentier,
Qui vous enveloppait de sa protection.
Et votre Jésus s’amusait avec la laine.
Qui sait, comme les miens, il mêlait peut-être l’écheveau ?
Ce qui n’est pas très mal, après tout, et fait rire
Les mamans, en sourdine… Bonne Vierge,
Si vous saviez, comme cette pensée grandit,
En moi, l’amour de ma vie sans secousse !
Penser que vous viviez ainsi, tous trois,
Dans une maison humble, une ville humble,
Comme notre maison et notre petite ville
Et que vous travailliez de vos mains, comme nous.
Penser que votre vie fut, ainsi, agréable au Seigneur ;
Votre vie tranquille, tout unie, comme la nôtre.
Penser que chaque tour de votre fuseau marquait une prière,
Comme chaque point de mon aiguille, dans la toile !
Jeanne L’ARCHEVÊQUE-DUGUAY (inédit).
Paru dans Notre-Dame de Lyre :
L’hommage des poètes canadiens-français,
anthologie réalisée par Sœur Paul-Émile
et éditée par les Sœurs grises de la Croix,
à Ottawa, en 1939.