Sérénade des anges
(Pour un enfant qui va mourir)
Ce n’est pas ma voix, ce n’est pas ma voix
qui se déchire,
C’est, rasant la plaine, le vent qui ploie
l’aile qui chavire.
Ferme les yeux, ferme les yeux,
Le vent passe, moi je demeure.
Ce n’est pas la nuit, ce n’est pas la nuit
qui te tient,
C’est, sur ta vie, l’ombre de mon chagrin,
ou ma main.
Ferme les yeux, ferme les yeux,
L’ombre s’efface, moi je demeure.
Ce ne sont pas mes larmes, ce ne sont pas mes larmes
qui brillent,
Ce sont, t’en souvient-il, toutes les étoiles
sous l’eau tranquille.
Ferme les yeux, ferme les yeux,
L’étoile se noie, je demeure
Ce ne sont pas les anges, ce ne sont pas les anges
en cortège,
C’est la première aube ou la première neige
sur les branches.
Ouvre les yeux, ouvre les yeux,
Tu pars avec les anges, je demeure !
Rina LASNIER.
Paru dans La Nouvelle Relève
en janvier 1942.