Chanson du ramoneur
Je suis fils de ramoneurs
Qui n’ont
De père en fils, de cœur en cœur,
qu’une seule destinée,
Et c’est de se perdre au fond,
Au fin fond des cheminées !
Les plus belles, de châteaux...
À l’aube,
On s’est glissé sous leurs rideaux ;
De tout le jour on ne sort,
Tout le jour, un jour de taupes
Courant dans leurs corridors.
On revient passé le soir,
Les yeux
Fumés, vagues et tout noirs,
Mais gardant le clair des chambres
Où dorment des gens heureux...
– Sur la route de décembre.
À l’autre Noël, perdu
Par chance,
Je ne suis pas redescendu :
Petit ramoneur glacé
Perché sur des toits immenses
À voir la Noël passer...
Patrice de LA TOUR DU PIN,
Une somme de poésie,
Gallimard, 1946.