À l’hiver
Ton pas s’enfonce, ô pauvre, et ton front se blêmit
Mais tous les seuils sont clos, va-t’en courir la place,
Hiver, puisque nul ne sait ce cœur qui frémit
Pareil aux puits dont l’eau bouillonne sous la glace.
Ah ! nous avons souffert tout ce long jour qui penche
Hein ! dis ? Mais que peut bien nous faire le manant
Quand la plaine est à nous, comme une feuille blanche
Où le vers envolé se pose en frissonnant.
Nous ne resterons plus trembler dans la rafale
Car, oh ! bientôt, douceur qui nous fera pleurer,
Décembre s’ouvrira comme une cathédrale
Et l’Enfant recevra, Lui, notre amour navré.
Et tu le berceras, ainsi qu’en un berceau
Ô tendre Hiver, avec ta voix de cantilène
Et pleins d’extase, effleurant ses doigts de roseau,
Nous offrirons la neige aussi douce que laine.
Carmen LAVOIE, Saisons de bohème, 1954.