Prélude

 

 

Dans mes bras j’ai saisi la harpe solennelle.

O soupirs des printemps, ô langoureuses voix

Qui montez en Avril de l’épaisseur des bois,

Voluptés et désirs de la Vie éternelle,

 

O baisers de lumière au fond des deux épars,

Rythmes mystérieux des étoiles, secousses

            Des vents aux tiges, clartés douces

Qui faites larmoyer les fleurs parmi les mousses

Et rendez tout à coup humides les regards,

 

Tendresses des yeux bleus, arômes des pervenches,

Frissons des ruisseaux clairs serpentant sous les branches,

Songes flottant dans l’air des nuits d’été, chansons

Des nids joyeux, des nids cachés dans les buissons,

 

Hymnes de rossignols, extases infinies,

Secrets d’amour, parfums qu’on ne peut réunir,

            Élans qu’on ne peut retenir,

Ivresses du Passé, vigueurs de l’Avenir,

Changez-vous sous mes doigts en nobles harmonies !

 

Changez-vous en accords de gloire, à tous les vents ;

Changez-vous en saluts d’immortalité rose,

En rayons éclatants d’immense apothéose :

 

Je tiens la harpe d’or entre mes bras fervents !

 

 

 

Philéas LEBESGUE.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1891.

 

 

 

 

 

 

 

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