À mes amis blessés...

 

 

À mes amis blessés j’offre aussi de ma laine

Et du manteau de pluie dont je me suis vêtu

Je ne sais rien de trop la famine et la peine

Et mes saisons d’enfant compulsent mes dossiers

Je ne sais rien de trop mes amis se souviennent

 

Mon Dieu c’est à ma vie que vous me rappelez

 

Je n’ai rien fait de très vivant ni de très sage

En vérité j’ai poignardé le ciel ici et là

Ne sont pas les lampions et les livres d’images

Qui me rendront la paix des fusils et des pas

 

Si je vous suis parent c’est par un coin de rue

Où la Seine a posé ses pièges ses oiseaux

Appuyé dans les plis d’une lampe déserte

Traversé de couloirs et d’ombres sous la peau

 

Si je vous suis parent c’est par le seul amour

Enlevé pour jamais à vos mains de partage

Si je vous suis parent c’est pour le seul visage

Emporté confondu noyé entre les ponts

 

J’ai dénoué mes voix de fées sur les cailloux

Et je m’attarde ici dans le ciel et la boue

 

Écrasez-moi contre les poutres des écluses

 

 

 

Marcel LE BOURHIS.

 

Recueilli dans Panorama de la nouvelle poésie

d’expression française, Unimuse, Tournai, 1963.

 

 

 

 

 

 

 

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