Praeconium Paschale

 

 

Le temps est revenu de nos fêtes sereines

Voici finir les jours de désolation.

Que l’on n’entende plus, en lamentables thrènes,

          Gémir l’opprobre de Sion.

 

Relevez-vous, ô fronts prostrés dans la poussière ;

Retrouvez des élans joyeux, cœurs pénitents.

Voyez, tout se ranime et rit dans la lumière.

          C’est la vie, et c’est le printemps.

 

Avril, l’ardent avril étreint la terre éprise,

Et, tandis qu’au zénith monte l’astre vermeil,

Le cycle de la vieille et toujours jeune Église

          Nous ramène le vrai Soleil.

 

Que les purs chants latins s’exaltent à sa gloire :

Et, pour la figurer surgissant du tombeau

Sous ta riche tunique, et d’un air de victoire,

          Ô Diacre, lève ton flambeau !

 

Annonce que demain, le Fort, le Pacifique

Les fera ruisseler, nos larmes, de bonheur...

La clarté brille enfin de ce jour, magnifique

          Entre les fastes du Seigneur.

 

Le Pontife joyeux, que la foule contemple,

Saint vieillard qui verra d’autres Pâques encor,

En des vapeurs d’encens, vers l’abside du temple

          Trône dans ses vêtements d’or.

 

Le peuple est ressaisi par l’esprit des ancêtres,

Plus d’un homme incliné gémit comme un enfant ;

La voix de l’orgue éclate, et tout le chœur des prêtres

          Acclame le Christ triomphant.

 

Salut à ce héros de la Sainte Louange !

C’est lui que le Prophète, au fond des temps montra,

Pareil au vendangeur, rouge de sa vendange,

          Qui vient d’Édom et de Bosra.

 

Lui qui nous a lavés de l’antique anathème,

Dans les flots généreux de son sang répandu,

Et qui voulut pour nous, en rachetant Lui-même,

          Rouvrir plus beau le ciel perdu.

 

Voyez-la resplendir la victime pascale :

Prémice de ceux-là qui seront couronnés.

Tout son sang lui devient une pourpre royale,

          Devant les Anges prosternés.

 

Il exulte, l’Agneau, dans sa vigueur divine ;

Son règne commencé n’aura pas de déclin,

C’est le vainqueur, qui porte, ouvert sur sa poitrine,

          Le livre, aux sceaux brisés enfin !

 

Mais le temps est rapide, et la dernière antienne

S’éteint avec le jour, qui commence à pâlir, Il meurt...

Ah ! que du moins, notre vie en retienne

          Le reflet, pour s’en embellir.

 

Bien morts, avec le Christ, à tout ce qui nous souille,

Sentant l’homme nouveau tressaillir dans nos cœurs,

Ne la reprenons pas, notre vieille dépouille,

          De ce monde, et de nous, vainqueurs,

 

Sourions à l’espoir de notre récompense,

Et qu’à nos fronts rayonne une telle clarté,

Qu’il semble que pour nous, dès ici-bas, commence

          La Pâque de l’Éternité.

 

 

 

Louis LE CARDONNEL.

 

Recueilli dans Poètes de Jésus-Christ,

poésies rassemblées par André Mabille de Poncheville,

Bruges, Librairie de l’Oeuvre Saint-Charles, 1937.

 

 

 

 

 

 

 

 

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