Prière du soir
Mon père, me voilà ; ma journée est finie.
Si j’ai fait quelque bien, je vous en remercie ;
Et si j’ai fait le mal, que votre charité
Pardonne encore à ma constante indignité.
Dans ce calme nocturne où je crois vous entendre,
Je songe à l’autre nuit que je verrai descendre
Lorsque le dernier jour à mes yeux aura lui.
Car la mort tombera comme tombe la nuit,
Comme elle irrésistible et profonde comme elle.
Que de toutes mes nuits elle soit la plus belle !
Ce soir, ainsi qu’on fait à l’heure de la mort,
Je vous offre mon âme à l’heure où je m’endors.
Mon père, accueillez-là, cette pauvre âme offerte !
L’élevant un instant hors de la chair inerte,
Faites que je la sente hésiter et partir,
Afin qu’en m’endormant je m’apprenne à mourir.
Louis LEFEBVRE, La Prière d’un homme.
Recueilli dans Louis Chaigne,
L’anthologie de la renaissance catholique :
Les poètes, Alsatia, 1938.