Membra Dei
Jésus est parmi vous, chrétiens, je vous le dis.
Ne levez plus les yeux si haut : le paradis,
Où vous croyez qu’il trône à la droite du Père,
Lui plaît moins que notre humble sphère.
Nuit et jour, à la ville, aux champs, Jésus est là.
Tout à l’heure une voix doucement vous héla
Dans l’ombre, une voix sourde et comme agonisante :
C’était lui, mais non point comme on le représente
D’ordinaire, nimbé de gloire et de clarté.
Peut-être à votre insu, l’avez-vous rebuté,
Il est celui qu’on raille et celui qu’on malmène ;
Et, dans l’immensité de la misère humaine ;
Son corps divin, que vous cherchez au firmament,
S’est comme dilué mystérieusement.
Ô chrétiens, apprenez enfin à le connaître !
Pareils à ces maisons qui n’ont pas de fenêtres,
Vous ne voulez pas voir qu’il vient sur le chemin,
Triste, traînant la guêtre, un bâton à la main ;
Qu’il est légion, lui qui n’a pas un disciple,
Et que vous l’avez là présent, un et multiple,
Mieux qu’en sa gloire, mieux qu’en d’éclatants tissus,
Dans les pauvres qui sont les membres de Jésus.
Charles LE GOFFIC.
Recueilli dans Poètes de Jésus-Christ,
poésies rassemblées par André Mabille de Poncheville,
Bruges, Librairie de l’Œuvre Saint-Charles, 1937.