Marseille

 

ODE.

 

 

Sous son ciel d’Orient la cité phocéenne

À la fois de la Grèce et fille et citoyenne ;

Marseille, l’espérance ou l’abri des nochers,

Brillante, sur son lit et d’algue et de rochers,

        Aussi nonchalamment repose

        Qu’une odalisque au teint de rose,

Ou qu’une cantharide aux changeantes couleurs,

Dort, fille du soleil, au calice des fleurs.

 

Et comme l’odalisque, après sa nuit de veille,

Se mire en sa psyché, la voyez-vous, Marseille,

Superbe, se mirer dans l’azur de la mer

Dont l’onde la caresse avec son flot amer :

        C’est que, reine de la Provence,

        Cette vieille cité de France,

Fière de ses aïeux, au symbole chrétien,

Veut encore attacher le bonnet phrygien.

 

C’est ici qu’au printemps, parfumé d’ambroisie,

L’on respire partout un air de poésie ;

C’est ici que l’on fait l’amour à l’Espagnol,

Que l’amant se transforme en tendre rossignol,

        Et va chanter sa cantilène

        Ou boire la brûlante haleine

De sa brune à l’œil noir, haletante d’amour,

Qui l’attend au balcon à la chute du jour.

 

Sous les feux du soleil, tandis qu’elle étincelle,

Sur la mer, vers le soir, glissez dans la nacelle,

Et du golfe riant, où brille le ciel pur,

Dites lequel des deux reflète mieux l’azur ;

        Et si de la cité qu’il dore,

        L’astre splendide qui l’adore,

Déclinant vers le cap, n’a pas l’air d’un amant

Qui baise avec amour ce rivage charmant.

 

Si tu le veux, à l’heure où le soleil décline

Tous deux nous monterons sur la sainte colline.

Dont le sommet tout blanc comme un crâne pelé

Est couronné d’un temple et d’un fort crénelé ;

        Là tout fracas du monde expire,

        Et l’âme pieuse y soupire

Des cantiques d’amour.... du ciel c’est le chemin....

Il est rude et pénible.... et Dieu t’y tend la main.

 

 

 

M.-J. L’HERMITTE.

 

Paru dans les Annales romantiques en 1835.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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