Saint Christophe Colomb
– Fais-moi passer la mer, Saint Christophe ! Fais-moi passer, je veux passer de l’autre côté !
Et Saint Christophe fit passer Jésus de ce côté-ci.
L’enfant voulait des fleuves nouveaux
Et quand les missionnaires, les batteurs de brousse, les explorateurs passaient les fleuves, Jésus passait aussi.
Jésus vit des fleuves, des mascarets remontant les fleuves, des fleuves qui inventaient des chemins, des fleuves peuplés de poissons électriques, des fleuves et des fleuves qui passaient la terre et faisaient route vers la mer.
Les explorateurs passaient le fleuve et passaient Jésus aussi.
Ils faisaient une petite chapelle, ils laissaient Jésus sur la berge.
L’enfant était petit mais il pesait, il pesait plus que tous les hommes réunis.
Ils disaient : Jésus est resté au bord du fleuve, planqué dans la petite chapelle.
Et quand ils trouvaient un autre fleuve, toujours toujours une petite voix :
– Passe-moi de l’autre côté. Passe-moi !
Mon Saint Christophe c’est vous, Saint Christophe Colomb qui avez passé Jésus sur la mer.
Mon Saint Christophe c’est vous, Saint Christophe Colomb qui avez passé Jésus de ce côté-ci.
Jorge de LIMA.
Traduit par Armand Guibert.
Recueilli dans Anthologie de la poésie ibéro-américaine,
Choix, introduction et notes de Federico de Onis,
Collection UNESCO d’œuvres représentatives, 1956.