Prologue
C’est en un coin perdu, dans une ville vieille,
Que je voudrais rêver mon rêve éperdument ;
C’est là depuis longtemps que mon âme sommeille
Dans les mousses de deuil et l’amoncellement
De marbres de tombeau, de vétustes ruines
Qui se dressent, pensifs en leur isolement.
Oh ! les vieilles maisons que lavent les bruines
Oh ! les petits volets qui s’ouvrent au matin !
Laissant voir la blancheur muette des courtines,
C’est vous qui rappelez à mon cœur enfantin
Une évocation de choses très antiques.
Que je voudrais graver en mon âme au burin.
C’est à l’église morne à l’ombre des portiques,
C’est au cimetière où blanchissent les croix,
C’est au chuchotement des motets liturgiques,
C’est au pas cadencé, triste et doux à la fois,
Des béguines qui vont aux messes matinales,
C’est à vous souvenirs et débris d’autrefois
Que je veux dédier ces pages virginales.
Victor LUYSSEN.
Paru dans La Flandre littéraire,
artistique et mondaine en 1897.