Prière à Dieu sagesse éternelle
Ô SAGESSE éternelle, je ne suis point ma lumière à moi-même, et les corps qui m’environnent ne peuvent m’éclairer ; les intelligences mêmes ne contenant point dans leur être la raison qui les rend sages, ne peuvent communiquer cette raison à mon esprit. Vous êtes seul la lumière des anges et des hommes ; vous êtes seul la raison universelle des esprits ; vous êtes même la sagesse du Père, sagesse éternelle, immuable, nécessaire, qui rendez sages les créatures et même le créateur, quoique d’une manière bien différente. Ô mon véritable et unique maître, montrez-vous à moi, faites-moi voir la lumière en votre lumière. Je ne m’adresse qu’à vous ; je ne veux consulter que vous. Parlez, Verbe éternel, parole du Père, parole qui a toujours été dite, qui se dit, et qui se dira toujours ; parlez, et parlez assez haut pour vous faire entendre malgré le bruit confus que mes sens et mes passions excitent sans cesse dans mon esprit.
Mais, ô Jésus, je vous prie de ne parler en moi que pour votre gloire, et de ne me faire connaître que vos grandeurs ; car tous les trésors de la sagesse et de la science de Dieu même, sont renfermés en vous. Celui qui vous connaît connaît votre Père et celui qui vous connaît et votre Père est parfaitement heureux. Faites-le-moi donc connaître, ô Jésus, ce que vous êtes, et comment toutes les choses subsistent en vous. Pénétrez mon esprit de l’éclat de votre lumière ; brûlez mon cœur de l’ardeur de votre amour ; et donnez-moi dans le cours de cet ouvrage, que je compose uniquement pour votre gloire, des expressions claires et véritables, vives et animées, en un mot dignes de vous, et telles qu’elles puissent augmenter en moi, et dans ceux qui voudront bien méditer avec moi, la connaissance de vos grandeurs et le sentiment de vos bienfaits.
MALEBRANCHE, Méditations chrétiennes,
IXe méditation.
Recueilli dans Devant Dieu,
anthologie de la prière chrétienne,
par Pierre Richard et Bernard Giraud,
Éditions Xavier Mappus, 1948.