La vieille souche
Assis sur la grande pierre devant la maison
sous le vieux pommier, le laboureur se décharge
de sa lassitude extrême c’est la pierre
le trône et le calvaire des pauvres gens.
Il fume, et remuant d’un clou de forgeron
le tabac dans le fourneau de la pipe,
écoute le bavardage du torrent qui apporte
sa bonne eau fraîche à la terre
aride et crevassée comme son visage ridé.
Tronc vieilli, aux nombreuses branches,
il a donné tous ses fils à sa Patrie,
aux sombres casernes, aux villes
qui sont si loin de sa petite ferme.
Taupe creusant le verger, ours solitaire des forêts,
toujours à la terre de ses pères enchaîné,
ses longs labours ont usé sa pioche,
les mauvais tabacs ont fêlé sa pipe de plâtre,
l’épuisement a terni son regard, le grand âge
a alourdi sa tête et blanchi ses cheveux.
Pourtant, à l’heure mélancolique des vêpres,
le calme paisible descend dans son cœur
s’il écoute encor le son grave de l’orgue
qui chante sa prière au-delà de la porte du couvent.
Antonio MANUPPELLI.
Traduit de l’italien par Enrico Bardi.
Paru dans Rythmes et couleurs en 1965.