Nuit d’étoiles
Le ciel, ce soir, est un écrin
Tout ruisselant de pierreries.
Le champ d’azur, dans le lointain,
De ses marguerites fleuries
Va resplendir jusqu’au matin...
– Ô vous qui ravissez la terre
De paix et d’éblouissement,
Vous que la nuit, douce bergère,
Mène aux cieux éternellement,
Puisque vous dépouillez les voiles
Qui vous cachaient à mon souci,
Laissez-moi vous crier ceci :
Mon amoureuse est loin d’ici ;
Mais vous l’aimez, douces étoiles :
Voudriez-vous m’aimer aussi ?
Dieu vous créa pour être belles,
Et Dieu m’a fait pour vous chanter ;
Et, toi qu’on entend palpiter,
Vent de la nuit, laisse monter
Dans tes effluves solennelles
Mon chant qui vient d’ouvrir ses ailes :
Les étoiles vont m’écouter...
– J’avais saisi ma jeune lyre,
Mais aucun accord n’en sortait,
Et pourtant mon âme chantait,
Et rien d’humain ne saurait dire
Le vaste amour qui l’enchantait.
Dans le pacifique mystère
Mon cœur à Dieu s’était lié ;
J’avais un moment oublié
Les folles choses de la terre,
Et, par delà les horizons
Des éternelles floraisons,
J’entrevoyais encore, encore,
Tant d’abîme et tant de clarté
Que mon esprit, épouvanté,
Réclamait les feux de l’aurore !
Paul MARIÉTON.
Paru dans L’Année des poètes en 1893.