Après
Je suis sorti dans la nuit.
Le cœur lourd de larmes,
Après tout ce qu’ils m’ont fait,
Après tout ce qu’ils m’ont fait...
Et alors des vers ont chanté,
Jusqu’à ma lèvre ils sont montés,
Plus tristes que la mort et que la haine,
Pour énoncer ma peine...
Mais, soudain j’ai vu la nuit claire
Et j’ai mordu mon sanglot
Sur mes lèvres amères ;
Mais, soudain, j’ai vu la nuit claire
Et j’ai trouvé que tout était si beau
Qu’il importait peu si la colère
Brisait mon cœur et faisait crier mon sanglot.
En douceur j’ai changé ma douleur,
Et j’ai voulu ne chanter que la joie,
Et j’ai parlé tout haut de vos roses, Seigneur,
Du ciel de lait, des cœurs aimants, et de la foi,
Du printemps, des baisers, et de toutes les choses
Que l’on m’a refusées...
Et quand je me suis tu, j’avais l’âme sereine
Et la fragilité divine d’un enfant :
Et je sais désormais comment on se défend
Par le sourire et par le baume sur la plaie.
Mars-Avril 1906.
Camille MAUCLAIR.
Recueilli dans Toutes les lyres,
anthologie critique des poètes contemporains,
par Florian-Parmentier,
Gastein-Serge éditeur, s. d.