Noël canadien
Noël, au Canada, c’est la neige qui tombe,
Enveloppant le sol du blanc de son manteau ;
C’est la neige couvrant d’un duvet de colombe
La plaine et le côteau.
Dérobant à nos yeux les flots de sa crinière,
Le Saint-Laurent, courbé sous le joug des frimas,
Se cabre dans le givre et rugit de colère,
Ainsi qu’un coursier las.
Du Sauveur évoquant la naissance lointaine,
Noël fait retentir l’écho des carillons :
À l’appel de l’airain, la famille chrétienne
Se lève en bataillons.
Une foule pieuse,
Qu’électrise la foi,
S’écoule harmonieuse
Vers Jésus, l’Enfant-Roi.
Au fond de la chapelle,
Sous un dais de sapin,
Sourit l’image frêle
Du Rédempteur Divin.
À côté de leur mère,
Les petits, à genoux,
Disent une prière
Au Dieu qui vient à nous.
Des poitrines soudain jaillissent les cantiques,
Qui montent jusqu’au ciel, comme un encens d’amour ;
Un souffle du passé vibre en ces airs antiques
Annonçant un grand jour.
Le vieillard qui chancelle, au terme de la vie,
Près du berceau riant sent son cœur rajeunir :
De la crèche où renaît l’immuable Messie,
Surgit maint souvenir.
Enivrant de bonheur l’enfance et la vieillesse,
Dont les cierges ardents illuminent les traits,
Noël exhale au temple un parfum de jeunesse
Où rayonne la paix.
Montréal, décembre 1901.
Oswald MAYRAND, Fleurettes canadiennes, 1905.