Notre-Dame-des-Flots

 

 

Ô Mère douloureuse, ayez pitié de Celles

Qui n’ont pas éprouvé cette douceur cruelle

De tenir embrassés, pour un dernier adieu,

Les enfants que la mer prend dans ses rets infâmes.

Vierge, venez en aide à la douleur des femmes

Qui n’ont pas pu pleurer sur le corps de leurs fieux,

Revoir, revoir encore, avant qu’elle s’en aille,

Cette forme d’amour qu’ont faite leurs entrailles,

Et que leur propre sang nourrit pendant neuf mois !

Ce corps qui remuait, si rose, dans ses langes

Lorsqu’ils étaient petits, et qu’ils riaient aux anges,

Et cherchaient à saisir la lumière à pleins doigts.

 

Oh! leurs rires vermeils, et leur boucle étonnée,

Quand on les habillait devant la cheminée,

Et que d’un long baiser le foyer les frôlait !

Ils ont beau devenir des hommes, lorsqu’ils meurent,

C’est dans le souvenir de ces lointaines heures

Que le cœur déchiré des mères se complaît.

 

Qu’est-ce que les flots noirs ont fait de leur dépouille ?

Et quels êtres hideux, sous l’eau profonde, souillent

Les yeux, restés ouverts, de ces pauvres enfants ?

Marie, au nom du Corps très saint dont vos mains pures

Ont essuyé le sang et fermé les blessures,

Protégez les marins dans leurs tombeaux mouvants.

 

Faites qu’au dernier jour, quand la trompette haute

Réveillera tous ceux que la mort a pour hôtes,

Ceux-ci, malgré le poids et l’épaisseur des eaux,

Entendent le signal, comme ceux de la terre,

Faites que, délivrés des ténèbres amères,

Vêtus du même corps, mais glorieux et beaux,

 

Faites qu’ils soient rendus les premiers à leurs mères !

 

 

 

Louis MERCIER.

 

 

 

 

 

 

 

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