Le pauvre mendiant

 

 

Je soufre, le besoin me contraint à le dire ;

Le malheur me retient sous sa méchante loi.

À ce monde bruyant, qui paraît vous sourire,

Dérobez un regard, pour le jeter sur moi.

 

L’eau pure du Léman vient baigner ma patrie ;

Là, comme vous, jadis, j’eus aussi mon bonheur.

Je suis pauvre à présent, je pleure, je mendie ;

Près du beau lac Léman n’est resté que mon cœur.

 

Je serais sans désir si vous viviez encore,

Bons parents, que vers lui rappela le Seigneur !

Mais je suis repoussé par la main que j’implore,

Et je n’obtiens jamais un mot consolateur.

 

Du pain, hélas ! voilà ce qu’il faut à ma vie.

Je ne sais point créer d’inutiles besoins ;

Ne fermez pas votre âme à la voix qui supplie :

Pour le pauvre le ciel a réclamé des soins.

 

Vous n’osez m’approcher !... L’habit de la misère

De celui qu’il recouvre est-il le déshonneur ?

Quand votre œil dédaigneux (oh ! du moins je l’espère)

S’attache au vêtement, Dieu regarde le cœur.

 

Il lit au fond du mien ce qu’il a de souffrance ;

Ah ! puisse-t-il au vôtre inspirer la pitié !

Donnez ; bien peu suffit à ma frôle existence ;

Donnez ; j’ai faim, j’attends... Aurai-je en vain prié ?

 

 

 

Élise MERCOEUR.

 

Recueilli dans

Recueil gradué de poésies françaises,

par Frédéric Caumont, 1847.

 

 

 

 

 

 

 

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