Les sages

Le vrai sage se réjouit, comme un pauvre pèlerin,

Lorsqu’en plein désert il rencontre un compagnon de chemin ;

Le faux sage, comme un voleur, s’enfuit au loin,

Car dans les autres il voit des rivaux ou des témoins.

Deux maîtres, également sages, leur doctrine enseignaient ;

Lequel disait la vérité ? La vérité fait saigner.

La foule siffla le premier, applaudit le second,

Le deuxième était flatteur, le premier était bon.

Deux êtres sont heureux même en ce monde souffrant,

Comme étant proches de Dieu : la vierge et l’enfant.

Si tu dois te disposer à quelque œuvre d’importance,

Pèse d’abord ton vouloir, et ensuite ta science ;

Moi, malgré la science et malgré le savoir,

Je n’agis que poussé par le devoir.

Un pur-sang sera dépassé par une haridelle,

Si, à la place de l’homme, l’esprit est en selle.

Adam MICKIEWICZ.

Trad. L. K.

Recueilli dans Adam Mickiewicz,

par Léon Kolodziej,

Seghers, 1970.