Jeanne
Jeanne, je t’ai cherchée en sanglotant, ô Jeanne,
par les vieux corridors où je sais que tu viens
tous les jours évoquer mes souvenirs en panne
et promener tes pas qui recherchent les miens.
Tes pas, je les entends... je les entends trop bien
comme un crépitement lointain dans la savane,
un cri de guerre au fond des jours les plus anciens
où dort un frais coteau de France paysanne.
Et j’écoute ta voix, telle un cinglant appel
à mon âme voguant parmi les archipels
à l’heure où l’on se bat et que meurt la patrie.
C’est toute ma jeunesse, ô Jeanne, que tu veux ?
et bien, je brûlerai pour toi tous mes aveux
et pour ton amitié je donnerai ma vie.
Christian de MIOMANDRE,
Libations, CELF, 1962.