Départs
Un homme va partir. Il a fermé sa porte,
Au rivage prochain ses frères l’ont conduit ;
Et, les derniers adieux échangés, chacun suit
Par delà l’horizon la voile qui l’emporte.
Une Âme va partir, libre, d’un corps détruit.
Vous, dont sa peine a fait la tendresse plus forte,
Et qui pressez en vain cette main déjà morte,
Ne cherchez plus la vie en ces yeux pleins de nuit.
Mais que votre Âme, à l’heure où cette Âme s’élance
Sur l’Océan voilé de l’éternel silence,
Suive, bien loin des bords que la joie a quittés,
Hors des liens de chair qui la tiennent captive,
Par delà l’horizon de ses réalités,
L’essor mystérieux de la Sœur fugitive.
Louis MONOD.
Paru dans L’Année des poètes en 1892.