Pensée dans la nuit
Dans le mystère de la nuit,
L’année, hélas, s’est envolée ;
Sombre, triste, morne et voilée,
Sans espoir, sans regrets, sans bruit.
J’entends le timbre monotone
Frémir lentement douze fois,
Et tel qu’un écho dans les bois,
Le dernier coup gronde et resonne.
La guirlande aux mille couleurs
Que le printemps nous a tressée,
Tombe bientôt, pâle et glacée
Par les aquilons destructeurs.
Tel aussi l’an qui vient de naître
Bientôt terminera son cours,
Et se joindra dans peu de jours
À l’an qui vient de disparaître.
Ainsi tout s’écoule et s’enfuit
La fleur sous l’aquilon succombe,
Notre berceau touche à la tombe,
Et le matin touche à la nuit.
C’est là ce qu’on nomme la vie !
Parfois une ombre de bonheur
Nous cache une grande douleur,
D’autres douleurs encor suivie.
Grand Dieu ! De ton trône éternel
Jette un regard sur cette terre,
Et daigne exaucer la prière
Que l’adresse un jeune mortel.
Vers le bien dirige nos pas,
Et pour nous bientôt laisse éclore
La douce et bienheureuse aurore
Du jour qui ne finira pas.
1er JANVIER 1858.
Adolphe MUNY, Chants et murmures, s. d.