Marée montante

 

 

Sur la plage riante une vague s’avance ;

Une autre la poursuit, d’autres viennent encor,

Et jusqu’à l’horizon, sur l’étendue immense,

On les voit accourir vers le fin sable d’or.

 

Il semble tout d’abord que la grève est trop vaste

Pour que les flots jamais puissent la conquérir ;

S’ils avancent parfois, que c’est peu, quel contraste

Avec le long chemin qu’il reste à parcourir !

 

Mais petit à petit la plage diminue

Sous l’effort répété des flots persévérants ;

Le contraste si grand lentement s’atténue,

Et le sable se livre à leurs bonds conquérants !

 

Ainsi l’humanité, dans l’infini des âges,

S’efforce d’arriver au bonheur, sans succès ;

Et pourtant elle avance à travers les orages

Sur la plage sans fin où volent nos souhaits !

 

Mais ainsi que le flot sur l’Océan sans bornes

Ne peut voir au-delà de son humble horizon,

Nous nous décourageons et nos cœurs se font mornes,

Pauvres captifs lassés, maudissant leur prison.

 

Et nous ne voyons pas que la marée avance,

S’approchant chaque jour du but qu’elle poursuit :

Ce royaume béni que veut notre espérance,

Vers lequel une main divine nous conduit !

 

 

 

Alice NICOLET.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1897.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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