Chanson pour la fête de mon père
La nuit rafraîchit le feuillage,
Où le vent aime à sommeiller,
Et la fontaine du village
Est toute seule à gazouiller.
Dans une obscurité paisible
Chaque maison s’ensevelit.
Mon père a renfermé la Bible.
Qu’il dorme bien ! Anges, gardez son lit !
Avant le jour, quand la rosée
Sème au loin son tremblant cristal,
J’entends déjà sous ma croisée
Mon père et son pas matinal.
Mais quand midi flétrit la rose,
Brûle nos prés et les pâlit,
Mon père en silence repose :
Qu’il dorme bien ! Anges, gardez son lit !
Oui, quand, inondé par l’orage,
Il revient des monts ou des bois,
Quand, fatigué du labourage,
Il sourit au bruit de nos voix,
Possesseurs des fleurs immortelles
Et des cieux, où tout s’accomplit,
Venez, et, de vos blanches ailes,
Couvrez mon père ! Anges, gardez son lit !
Juste OLIVIER.
Recueilli dans
Recueil gradué de poésies françaises,
par Frédéric Caumont, 1847.