Marie Guyart de l’Incarnation

 

Mystique de la Nouvelle-France

 

 

Première version

 

 

Quand on lit la vie et la correspondance de cette étonnante sainte

On a l’impression que ce qui nous inspire d’habitude, ce n’est pas l’orgueil ni la feinte,

Mais une certaine façon d’être ailleurs et de faire semblant de ne pas écouter

Que ce soit avec des larmes, un chant, ou une noire plume sur le papier.

Car il est facile d’ignorer notre passé et ces choses incroyables

Que les plus petits et les plus grands ont bâtis avec un accent inimitable.

 

Nous sommes à Québec, Marie de l’Incarnation enseigne aux petites filles de ces Hurons qu’on appelle injustement des sauvages,

Elle étudie leurs langues, et ne leur parle pas d’un Dieu qui est dans les nuages.

Elle est assise sous un chêne très vert, le même autrefois que celui de saint Louis,

Et leur explique que tout cela qui s’agite n’est rien, et que le Verbe seul suffit.

 

Car elle sait bien ce que c’est que les grands voyages, et cette décision impensable d’immigrer,

Quitter tout, sans être sûr de ce qu’on laisse, et moins encore de ce que l’on attend,

Et les bagages, la douane, les formalités, et les contrariétés du temps,

Être dans un pays nouveau qui nous saisit mal, et ces beaux paysages verts que l’on a largués.

Rien de cela ne lui fait peur, car elle est sûre de sa décision, et rien ne manque à sa pauvreté.

De toute façon, est-ce que Celui en qui on a mis sa confiance, peut nous laisser sur le quai et nous abandonner ?

Les épreuves qui surviennent, cet incendie qui détruit tout, ces souffrances intimes

Qu’est-ce que cela peut bien fiche si, avec nous, il y a cet ange qui nous fabrique la rose avec une contrerime !

 

J’habite sur les grands plateaux du Nord

Là-bas où les arbres ont quelque chose à dire dans le vent qui mord.

L’aventure est ici sous les nuages, entre quelques coins de ciel bleu,

Je sais bien que je ne serai pas confondu ni blessé par ces cœurs solides et preux

Que j’ai rencontrés, et qui m’ont ouvert toute grande leur maison,

Je te salue grand pays qui est juste et qui sent bon !

C’est ici qu’a vécu cette grande mystique avec ses compagnes, la sœur de Saint-Joseph, Madame de la Peltrie,

Et tous ces noms célèbres, Maisonneuve, de Laval, Catherine de St-Augustin, Talon et tous ceux qui ont construit peu à peu ma patrie.

On me parle d’un nom nouveau, et je suis bien d’accord,

Mais que rien ni personne ne fasse injure à la Vérité, et à la Providence de Dieu qui nous a, au prix de mille souffrances, menés au port.

 

Vénérable Marie de l’Incarnation, qui êtes encore parmi nous,

Souvenez-vous de cet individu qui ne sait pas grand-chose, mais qui pense souvent à vous !

 

 

 

 

À Michel Degroote

 

Deuxième version

 

Elle est partie, elle a tout laissé.

La voici maintenant sur ce bateau

Qui la conduit vers cette terre inconnue dont elle ne connaît pas encore un mot.

Ces sauvages, elle n’en a pas peur

Ni du froid, ni des privations, dont elle pressent l’existence dans son cœur.

Elle a rencontré Dieu, on dit même qu’elle a eu des extases,

Mais pour elle, ce qui compte, c’est ce que l’on fait aux plus petits, sans préambule ni emphase.

Elle n’est pas venue pour prêcher, mais pour construire

Et quel meilleur moyen que de donner sa vie totalement, pour y parvenir.

 

 

Benoît PATAR, À l’occasion des choses,

Le Préambule, 1980.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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